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Manifeste métaphysique


Auteur du livre: Raphael Liogier (et alii)

Éditeur: Les liens qui libèrent

Année de publication: 2019

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L’être se décline différemment selon les époques. Il y a « des » modes d’être et chaque âge a besoin de sa métaphysique pour exprimer sa vision de l’être (ontologie). C’est à la métaphysique de prendre en charge le souci qui anime cette ontologie. D’une époque à une autre les langages ontologiques et métaphysique ne se rencontrent plus. Le précédent système ontologique a façonné l’histoire occidentale depuis l’antiquité grecque jusqu’au 20ème siècle. Depuis Whitehead, une nouvelle philosophie est apparue centrée sur la notion de processus.

Première partie

L’inséparation, l’interdépendance, la relation, la concrescence (co/croissance), le mélange, le débordement sans limites, l’hybridation… expriment la liaison dynamique de tous les étants avec l’hyperprogrès technologique, qui pose des problèmes nouveaux à la communauté humaine. Ce qui importe, c’est ce qui émerge à travers de multiples réseaux de relations. Il est temps de manifester la métaphysique nouvelle qui en rend compte. Le rôle de la métaphysique est de procéder à une désappropriation, pour qu’ontologiquement plus rien ne puisse être exclusivement à personne : il y a à restituer du commun. C’est tout le monde qui gagne à se frotter au travail de trouver les mots pour dire ce qui change. La métaphysique c’est le désir natif de savoir. La métaphysique s’impose dès l’enfance.

Deuxième partie

Aristote a l’intuition que la métaphysique est à placer en avant, dedans, devant pour guider la science sur le réel : rien n’est réel que la métaphysique. C’est apparemment aussi ce que dit Kant : la causalité est simplement impossible sans l’a-causal ; la métaphysique donne le sens qui manque cruellement à la causalité. Descartes,  entre les 2, opère la distinction entre science et religion, grâce à une métaphysique désignée comme philosophie première, c’est-à-dire comme connaissance pure et rationnelle des principes de toute connaissance, l’établissant sur des bases fermes. Kant corrige Decartes au niveau de sa connaissance sensible. Le doute cartésien le laisse sceptique car on ne peut se passer de ses 5 sens. 

La question se reformule donc : la métaphysique doit viser à construire une représentation claire des concepts qui sont à l’origine de toute démonstration. Et l’entendement peut en effet constituer la science. Mais les limites de l’expérience font qu’il ne pourra jamais atteindre à l’essence du réel. La raison pure doit céder le pas à une raison pratique. Le sujet humain est divisé entre savoir et croyance. L’homme libre produit lui-même sa causalité éthique. 

On observera que l’élaboration d’un système métaphysique repose sur la nécessité d’un point de départ ontologique : on agit, on pense, on vise à penser l’être. Si on peut là-dessus élaborer un discours de l’être, alors la métaphysique sera la doctrine de l’être en tant qu’être. L’ontologie est le préalable de toute métaphysique. Tout système métaphysique est une tentative de répondre de façon complète à une question ontologique. Mais on ne peut réduire la métaphysique à son ontologie sous-jacente. Toute métaphysique présuppose l’ontologie mais ne peut se confondre avec elle. Une « dimension de transcendance » ou un aspect théologique sont toujours potentiellement collés à la chose métaphysique. Si bien que nous voilà ramenés à chercher la possibilité d’une métaphysique pour aujourd’hui. La vraie question est celle de savoir si on a encore la capacité d’exprimer l’être et de rendre compte de la possibilité, que l’on a encore aujourd’hui, de penser et parler. Il y a depuis Platon tout « un travail de décentrement » mais ce travail n’est pas achevé. Il y a intérêt à s’ouvrir aux métaphysiques non occidentales car la philosophie occidentale gagne à se voir  à travers les yeux de l’Autre. Mais il y a en outre à penser positivement par soi-même. Ce sentiment de devoir se décentrer se traduit par le désir de renouveler le sens des choses, d’inciser le réel pour l’ouvrir. La métaphysique cherche une expression nouvelle car aucune réponse ne vient réellement clore aucune question. Toute pensée, quelle qu’elle soit, est potentiellement touchée par un risque de cristallisation, d’où l’importance de garder un sens à l’impur, au multiple, au mixte. La métaphysique est l’expression du flux inconditionné de l’être. Elle permet la mise à distance, le dégagement, la déprise, le décollement. La métaphysique est l’écart qui permet de se dégager de l’emprise des choses.

Troisième partie

Pour Ricoeur, la métaphysique de la liberté est ouverte à la pluralité des régimes de vérité. La démocratie sans métaphysique étouffe dans le nihilisme. Marcuse dit que la politique démétaphysiquée se rend elle-même impuissante par manque de transitivité. Il y a une nécessité universelle de la métaphysique ; mais cela ne signifie pas qu’elle soit tout ce qui fait l’être humain, juste qu’elle en est constitutive. Elle n’est pas tout l’être humain mais c’est une nourriture indispensable intellectuellement à l’être humain. L’être humain a sa naissance n’est pas prêt physiologiquement ; cela s’appelle « la néoténie ». La métaphysique élève ce sentiment de faiblesse original à une dimension tragique : la question de la survie organique se transmute en questionnement sur l’existence de soi et en soi. 

Clément Rosset nomme artificialisme la reconnaissance sans fard de la réalité de la vie. C’est « l’artifice » qui est naturel au sens d’une vérité ouverte à toutes les possibilités. L’être humain est anti-phusis car la nature c’est une dérive qui fixe ce qui est vraiment le monde dans une essence, fixe ce qui soutient vraiment le monde dans une substance, alors que le vrai est débordant.Il y a nécessité de dépasser la métaphysique classique. On en appelle ici à une métaphysique ouverte sur toutes les possibilités de l’être, toutes les possibilités d’être. La métaphysique est un refuge, elle est le lieu de résidence de toutes les questions contre-intuitives, bizarres, dépourvues de sens immédiat, les questions inter-dimensionnelles, les questions migrantes qui ne se laissent pas enfermer dans une discipline. Nous sommes pour toutes les variations d’intensité, et tous les croisements conceptuels seront encouragés. Car le réel est toujours excédentaire. La métaphysique peut être nuisible quand elle est en état d’arrestation, comme dans l’arbitraire d’un régime totalitaire. La liberté métaphysique garantit la dignité humaine. Les révolutions se gagnent par la force métaphysique : nous croyons au changement désiré.

Quatrième partie

La métaphysique est la seule à même de rendre compte de l’avenir car elle ne cherche pas à le décréter. Chez l’être humain rien n’est seulement physique ; même le plaisir sexuel est métaphysique ; de même que la souffrance (Miguel de Unamuno). La double dynamique enstatique (plongée en soi) et extatique (désir de sortir de soi) est l’énergie de la métaphysique.  Gabriel Tarde et  René Girard affirment qu’aucune opposition n’est exempte de mimesis : ce qui s’oppose le fait à partir d’un lien fondamental au-dessous qui génère et soutient, rend possible « le dispositif oppositionnel ». On peut glisser ici  Leibniz et sa monade : la monade est une unité de perception ; les choses sont toutes des unités de perception, des perspectives sur l’ensemble du monde. Lorsque nous nous questionnons sur le monde ou sur le fait d’avoir une pensée, nous sommes des unités de perception et étant tous les mêmes, nous sommes donc inséparables de tous les autres, de toutes les unités de perception, qui nous regardent comme nous les regardons, inséparables y compris de ce que nous qualifions de matière, parce que nous la croyons extérieure à nous. Or le réel est entre tout, interstice, pli. La relativité est l’absolu à condition qu’un tel absolu ne cesse de se dérober. Whitehead dit que le réel est le mouvement même, le mystère du continu (et cette idée se retrouve même dans la théorie des cordes).Le rythme qualifie les objets. La diversité des particules apparemment séparées, qui composent notre univers, rappelle que, pour avoir une mélodie, il faut une suite de mêmes, pour faire des variations, des différences, sans que « ces différents plans » soient entièrement séparables entre eux et sans qu’ils soient séparables de leur environnement. Bergson appréhende des liaisons concrètes, ouvertes, singulières, spirituelles : la temporalité authentique est insaisissable intellectuellement parce que spirituelle. La vérité du temps est dans sa durée concrète faite d’intensités variables, soit la dimension proprement métaphysique du réel. Pour rappel, le vide quantique, c’est un type de fluctuation qui n’a de vide que le nom ; tout comme le rien n’est qu’un nom.

Cinquième partie

« La fausse question canonique de la métaphysique » draine une théologie dualiste implicite. L’abstraction est toujours une formalisation, un ensemble de formules qui débouche sur un sens pratique, c’est-à-dire un système d’injonctions morales (Kant). Les bioéthiciens ( Hans Jonas), les trans-humanistes (Ray Kurzweil) ont trouvé dans la philosophie de Husserl et surtout d’Heidegger une autorisation pour rejeter la métaphysique …car elle serait devenue une relique du passé révolu. L’abstraction opère la fermeture cognitive qui rend la morale efficace. Faire passer un problème pratique pour une question métaphysique est classique : soit la situation quotidienne très pratique de devoir ranger sa chambre, vu le diktat de la mère : on en vient au constat qu’en réalité aucune chambre n’est mal rangée, parce qu’elle relève d’un principe d’ordre, le mien, qui n’est pas celui de ma mère. Transposer au-delà du plan pratique et enjoindre à tout l’univers d’être en ordre, c’est absurde. 

La vraie question en métaphysique c’est : pourquoi y a-t-il ce monde et pas un autre. La question ainsi ouverte croise le questionnement de l’être parce qu’elle engage à se dire d’abord : pourquoi être ? pourquoi suis-je, moi ici, dans ce monde ? dans quel rapport suis-je avec ce monde ? Il est inimaginable d’être né, d’apparaître soudain dans ce monde, d’être jeté dans le monde, et c’est pourtant le cas. Qu’appelons-nous naissance ? il y a à s’étonner, à regarder cette évidence. Et « ce voir-à-travers », c’est ce que Bergson appelle l’intuition. Celle-ci est sensible au réel, qui est un ensemble non fini des liens qui tissent le monde. 

Hélas Heidegger cache un jeu : chercher obsessionnellement  à faire disparaître quelque chose, ici, la métaphysique, mais cela laisse des traces…qui se confondent avec la culpabilité de son auteur. Ce reste fut-il microscopique définit une zone résiduelle qui ne cesse d’insister et de rappeler sa présence sur un mode indirect, comme un reste d’impureté métaphysique. Ce que cherche vraiment Heidegger, c’est l’identité occidentale, là où on est entre nous. La post-modernité, c’est la nostalgie d’un site original exclusif, qui a des relents de différentialisme raciste.

C’est la promesse d’ouverture de la modernité qui rend possible la métaphysique concrète. Il y a à comprendre les liens qui nous enracinent, comme des liens qui nous libèrent. L’être-là est débordement non assignable à une position fixe, il est progrès, mouvement, temporalité, créativité et mélange ; le lien dans l’être là est toujours mixte, il est fait de la chair de tous les autres. Toute métaphysique dualiste est obligée de travailler contre elle-même. Pourquoi la méthode dialectique conduirait-elle plus sûrement à la vérité ? Du coup Aristote passe en revue les différents cheminements possibles du raisonnement et fonde sa logique ; Aristote est curieux ! La nouveauté ici serait maintenant de promouvoir la créativité métaphysique, ouverte et pourtant rigoureuse, donc critique mais non hégémonique. Il faut accepter avec modestie qu’on participe au monde des croyances d’un certain type : spéculatives, auto-réflexives, critiques (car nos métaphysiques sont falsifiables). Badiou rejoint Whiteheadet Deleuze, en parlant de la métaphysique comme d’une philosophie de l’événement : place à l’actuel. 

Sixième partie

On gagne à prendre conscience de ses propres limites, au-delà desquelles, d’autres métaphysiques, d’autres théories pourraient se cotôyer. Le mot de transcendance n’est pas à opposer à celui d’immanence car ces 2 notions ne sont pas hiérarchisables, ni opposées, ni imposables mais elles animent une tension, celle qui fournit de l’énergie à la métaphysique ; la transcendance est le désir d’outre-passer ce qui m’environne en moi et autour de moi. Ce désir de dépassement de moi c’est l’au-delà de la question de l’au-delà sans fermeture. L’immanence non plus n’est pas clôturée par la nature vraie ou les faits purs : c’est la tension sensationnelle, c’est le spectacle du monde tel qu’il s’offre et étonne.

Marquons une respiration : la logique d’Aristote bute sur « le mur de l’impossible » car il n’est pas question de dépasser les principes d’identité, de non-contradiction et de tiers exclu : autrement dit sa logique accepte des contraires, entre général, particulier et exceptionnel, entre nécessaire et interdit, mais donc ne s’ouvre qu’au possible. Pour approcher l’impossible, avec Badiou, on se frotte au réel plus qu’à la vérité. Ceci dit, aujourd’hui certains continuent à croire que l’accès à la chose en soi est garantie par une perception éclairée, une science puissante, « une logique sophistiquée et un langage purifié de sens commun ». Russell se dresse contre Wittgenstein et contre Whitehead ; il se dresse contre une position, affirmée dans le refus de la formule dogmatique : mot=chose, perception=objet, vérification=vérité. Wittgenstein voit arriver la dérive que Russellengendre et qui se cristallisera dans les problèmes mind/body. « La philosophie analytique » centrée sur la pleine conscience méprise le travail de Whitehead, pour qui « tout est affecté et  s’affecte ». Searle rejoint Russell pour s’opposer à  David Chalmers : c’est toujours la même confusion due au fait de ramener le mouvement à l’espace, la continuité à la liaison des points et des lignes, pour produire des discontinuités formalisées et mécaniques, face à ceux qui pensent la continuité elle-même. Ces derniers tentent de la penser… et parmi eux il y a Sandra Laugier qui travaille à maintenir le dialogue entre l’Europe et les USA (+ UK).Aujourd’hui ce qui importe, c’est d’abord de penser une ontologie, qui rend compte de la situation d’hyper-concrescence et d’inséparabilité du réel, permettant d’affronter les problèmes de repositionnement de l’être humain dans l’ensemble de l’être… et donc de déduire des usages de cette ontologie des propositions nouvelles et les mettre en pratique. Longtemps on a cru que le progrès passait par le rejet de la métaphysique mais cela a été fait au prix de ne plus dire un mot sur la transcendance, l’être, la croyance et la mort. On a cru comprendre le dernier mot de Wittgenstein comme une  invitation à passer à autre chose (« car ce dont on ne peut rien dire il faut le taire ») ! Mais en passant à l’opposé de la vérité de cet aphorisme, on a congelé les questions alors qu’il y avait là un manifeste à se mettre au travail d’un changement de logique et de paradigme.

Septième partie

Badiou insiste pour dire que la critique ne suffit pas car il faut recourir à d’autres systèmes logiques plus complexes, pour pouvoir appréhender, dans un cadre élargi, les questions de nature métaphysique. Les post-kantiens et post-hégéliens ont essayé en vain car toute critique de la métaphysique reste elle-même métaphysique, en restant prise dans les rêts du miroir : ce dont il faut extirper la philosophie ce n’est pas de la métaphysique mais du dualisme. La hiérarchie qualitative qui classe, désigne et affecte, justement affecte. Elle établit une plus ou moins grande autorisation d’être au monde selon qu’on est en accord + – avec le principe. C’est cette métaphysique là qu’il y a à remettre en question. 

Nous sommes partisans d’un strict anarchisme ontologique. Alors une métaphysique qui ne serait pas dualiste, est-elle possible ? Il y a une extrême actualité, un enjeu polémique actuel d’une possibilité de la métaphysique : « la question du commun ». Gramsci dit qu’il faut allier le pessimisme de l’intelligence avec l’optimisme de la volonté. Comment penser quelque chose de grand ? Le point de vue de la totalisation sans totalisme consiste à penser les problèmes par rapport à l’universalité concrète de l’être humain. Universalité ici renvoie à un « nous sommes tous concernés par les problèmes d’aujourd’hui ». Le sens de l’universalité concrète c’est celui d’une affection (on est affecté) ou d’une affectabilité (pouvoir d’être affecté) généralisée. Qu’est ce que la métaphysique sinon une pensée qui ose s’avancer, en ne se soutenant que de sa propre consistance, pour  littéralement refaire le monde ? C’est en tout cas ce que cherchent  Elie DuringPatrice ManiglierQuentin Meillassoux,  David Rabouin.Une métaphysique hypermoderne, pensée à partir de l’inséparabilité, ne peut être que dynamique et inclusive. Ici le commun est donné par définition, il n’y a plus à dépasser les frontières de la membrane de la définition. Hegel disait déjà que le réel est rationnel. Zizek rappelle la suite de cet aphorisme hégélien :  ET le réel est pas-tout rationnel. L’auteur de ce manifeste commente dans le même sens : le réel est relationnel. Dans le monde, les choses sont liées entre elles par des emboîtements relationnels infinis. Comment se fabrique le commun, établi par principe, mais d’une extrême complexité dans l’action, puisque tout est autorisé à s’hybrider avec tout ? L’hyperouverture est ouverte à tout y compris au pire. 

Huitième partie

Comment dès lors poser une limite du possible ? S’il n’y a rien de séparable, comment clore une chose sur elle-même par un acte de propriété ? La mise en relation de chaque élément avec tous les autres, dit Jean Jacques Rousseau, suscite le sentiment d’une appartenance commune. La propriété exclusive est à l’origine de l’inégalité et du désastre écologique, cela nous colle tous à la peau. Il n’y a pas d’échappatoire, la pollution adhère à tout. Timothy Morton développe la « notion d’hyper-objet », en ajoutant que le problème dépasse nos capacités cognitives. Il y a « des choses massives » et massivement réparties dans le temps et l’espace par rapport aux humains. On ne peut ni les isoler ni s’isoler d’elles. Elles sont non locales mais surtout visqueuses. Leur temps n’est pas à l’échelle humaine et elles créent « des vortex » qui modifient notre espace-temps (ondulation temporelle). elles se développent par phases qui sont au-dessus de nos moyens de perception, jusqu’à ne pas nous apparaître longtemps, avant de nous sauter soudain aux yeux vu leurs effets de phasing. On les détecte alors dans un espace composé d’interactions entre leurs « propriétés d’objets » affectant nos facultés esthétiques et de goût. Ils sont dégoûtantes pour nos habitudes, « ces objets en interaction entre eux, au point de tramer une réalité hyper-objective » où nous perdons le contrôle …surtout si ce sont nous qui les avons fabriqués ; prenons l’exemple des sacs en plastique au milieu de l’océan.Ce qui est en jeu, c’est la distinction entre appropriation et appartenance. Ce qui nous appartient n’est pas nécessairement de l’ordre de la propriété. Nous sommes constitués de cercles d’appartenance intriqués et inséparés (nom, lieu, histoire, époque, roman familial) jusqu’à « générer des enchâssements de sphères inclusives » pour nous produire nous-mêmes à travers des techniques devenues autonomes et aliénantes (les réseaux remplis par les selfies). On entre dans une nouvelle anthropologie. C’est l’humanisme qui a donné corps au dualisme métaphysique de la manière la plus radicale, nous sommes donc anti-humanistes. Deleuze (en écho de Peter Sloterdijk ci-dessus) opère le retournement de la métaphysique classique, où l’abstrait expliquait le concret, alors que c’est le contraire. Plus exactement, concret et abstrait coexistent dans « une matérialité généralisée » ; le concept n’est pas qu’une idée, il a une dimension de matérialité concrète. Il y a lieu de mettre en crise certains systèmes. Nous croyons dans l’intense potentiel de corrosion métaphysique .